Dans la langue française, le mot « sens » couvre plusieurs notions.
- La direction ou la projection
- La signification ou la définition
- L’intuition ou la perception (le 6ème sens)
- La raison d’être
Comme nous avons tous un système de croyance, une vision du monde, ainsi qu’une vision de nous-mêmes et des autres qui nous sont propres, nous avons une définition très personnelle de ce que donner du sens veut dire.
Et c’est notamment le cas quand on parle de sens au travail. Ce qui a du sens pour moi n’en n’aura pas forcément pour vous, et vice et versa.
Approfondissons la relation qui lie de plus en plus sens et travail.
Le sens au travail, quels sont les derniers chiffres ?
A l'occasion de la Semaine pour la qualité de vie au travail (du 20 au 24 juin 2022), un sondage Opinion Way réalisé pour l'Anact décrypte le rapport qu'ont les actifs au travail.
- Plus de 8 actifs sur 10 estiment aujourd’hui que leur travail a du sens.
- 4 actifs sur 10 envisageraient de quitter leur job pour un emploi davantage porteur de sens dans les deux ans à venir.
- 2 actifs sur 10 s’interrogent - plus qu’avant la crise sanitaire - sur le sens de leur travail.
Les deux premiers résultats peuvent sembler un peu contradictoires. Ils illustrent en fait le souhait des actifs à aller vers des emplois qui ont toujours plus de sens pour eux.
Ce sondage fait également ressortir 3 grandes dimensions qui contribuent à part égale au sens au travail :
- Le sentiment d’utilité. Il est au cœur du sens en matière travail, qu’il soit dirigé vers la société, la population, les clients, ou l’entreprise.
- La cohérence éthique. La cohérence des valeurs professionnelles et personnelles joue un rôle majeur dans la perception d’un travail qui a du sens. Il s’agit d’une part de la possibilité d’effectuer un travail de qualité dans de bonnes conditions et d’autre part d’être en accord avec ses valeurs et de bien équilibrer ses temps de vie.
- La capacité du travail à contribuer au développement d’autrui. Il s’agit ici de la possibilité de s’épanouir et d’apprendre au travail, de progresser dans sa carrière et de faire progresser les autres.
La reconnaissance conférée par le travail revêt également une importance majeure, et ce devant les aspects liés à la rémunération.
Les aspects relationnels ne sont pas en manque et ressortent également comme une dimension clés pour définir le sens au travail.
La quête de sens, individuelle ou collective ?
Sans doute un peu des deux.
Elle est individuelle quand on cherche par exemple à se dépasser personnellement pour réaliser un travail de grande qualité, ou encore à se donner les moyens d’évoluer en développant ses compétences. Elle devient collective quand on cherche la possibilité de faire un travail dans de bonnes conditions en entretenant des relations avec ses collègues, ou en cherchant un sentiment d’utilité, ou encore en étant sensible à la reconnaissance de son travail.
Le sens au travail, une nouvelle mission pour les RH ?
Sans doute, mais pas que !
D’après un article paru dans les Echos en 2020 (Florent Vairet, 15 mai 2020) « 90 % des salariés jugent essentiel ou important que leur entreprise « donne un sens à leur travail » et 85 % estiment essentiel ou important qu'elle leur permette « de se sentir utiles aux autres ».
Nous le savons tous, donner du sens au travail c’est s’assurer de la motivation de ses collaborateurs, et les collaborateurs motivés et engagés sont bien plus performants que les autres. Nous savons également que la perte de sens au travail est l’une des causes du « brown-out » qui génère beaucoup de dégâts au sein des entreprises.
Il semble donc que, même si elles ne peuvent pas être seules responsables du sens au travail, les entreprises ont fort intérêt à se saisir du sujet.
Mais les collaborateurs ont aussi leur part de responsabilité. Nous l’avons vu, la perception du sens au travail est très personnelle. Chacun doit donc réfléchir à ce qui fait sens pour lui et se donner les moyens de nourrir sa quête sans tout attendre de son entreprise.
La quête de sens, un effet de mode ?
Chez arkot studio, nous préférons parler de réveil des consciences !
Le sens que l’on donne aux choses est guidé par notre système de croyances et de valeurs. Il faut avoir conscience que ce système est mouvant. Les religions, les sciences, les guerres, les progrès techniques et sociaux, l’art, la culture, les courants politiques, bref notre histoire et nos expériences ont fait et font perpétuellement évoluer nos socles de croyances, au point que de nouvelles catégories perçues comme riches de sens voient le jour : le bien-être, la santé, l’inclusion, le dérèglement climatique, les inégalités, … et s’invitent dans le monde professionnel et dans notre quête de sens au travail. Il était peut-être temps, non ?
L’irruption de Covid dans nos vies, et avec lui l’expérience du confinement, a accéléré ce mouvement de quête de sens au travail.
Nous avons « découvert » la notion de métiers dits essentiels comme les caissières, les personnels d’entretiens, les soignants, et tant d’autres, … tellement invisibles en temps normal. Des métiers souvent négligés, peu ou mal considérés… et pourtant… sans eux…
Ces personnes ont soudainement été reconnues dans leur métier par toute la population et ont sans doute retrouvé du sens dans leur utilité en faisant tourner le pays !
On voit bien ici que le contexte dans lequel nous évoluons peut, et c’est heureux, changer notre perception de ce qui fait sens.
Prenons un autre exemple : l’écologie et le dérèglement climatique. Ils viennent questionner chacun sur son impact individuel et collectif, sur son utilité, sur son rôle dans les rouages de ces systèmes aussi bien dans la vie privée que dans la vie professionnelle.
Deux vidéos ont particulièrement fait le buzz cette année, montrant à quel point les questions autour du sens que l’on veut donner à sa vie et à son travail sont liées, et à quel point elles sont au cœur des interrogations et des actions des jeunes adultes notamment.
Si vous ne les connaissez pas, allez y jeter un œil !
- le discours d’Anne-Fleur Goll, jeune diplômé d’HEC
- l’intervention des jeunes diplômés d’AgroParisTech
Quand on regarde ces vidéos on ne peut que constater que l’engagement comme la volonté d’agir sont bien présents !
La question est alors : comment s’adapte le monde du travail face à ce besoin de sens tant individuel que collectif ?
Les individus font leur choix : démission, reconversion, ville ou campagne, bureau ou home office, salariat, entreprenariat ou freelance, tout est possible pourvu que l’on ait le sentiment d’avoir retrouvé du sens dans son travail.
Côté entreprise on voit de tout : Elon Musk a sommé ses salariés de choisir entre le travail en présentiel et la porte, quand d’autres patrons vantent au contraire le travail à distance pour attirer une main-d’œuvre trop rare qui semble trouver du sens au travail ailleurs que dans un collectif….
Et pourtant l’entreprise n’est-elle pas avant tout une aventure collective qui devrait pouvoir, à elle seule, faire sens ? N’est-ce pas là le rôle attendu des entreprises dites à mission qui fleurissent comme des champignons ?
Pourquoi y a-t-il finalement une telle imbrication entre choix de vie et sens au travail alors qu’il y a encore peu de temps nous cherchions l’équilibre entre vie privée et vie pro, comme si les deux devaient absolument être séparés ?
Finalement toutes ses questions ne traduisent-elles pas simplement notre perpétuelle quête de sens qui va au-delà du travail : A quoi on sert pourquoi (pour quoi) on est là ?
A méditer…